AfghanistanAfghanistan

République islamique d'Afghanistan
Jomhuri-ye Eslami-ye Afghanestan

Drapeau de la république islamique d'Afghanistan
Capitale Kaboul
Population 21,3 millions (1996), 32,7 millions (estimation juillet 2008)
Langue officielle pashtou et dari (farsi)
Groupe majoritaire aucun groupe majoritaire
Groupes minoritaires pashtou (38 %-40 %), dari (26,2 %), hazara (6,5 %), ouzbek (6,5 %), turkmène (2,3 %), brahoui (1 %), baloutchi (1 %), pashayi du Sud (0,5 %), etc.
Système politique émirat islamique de type autoritaire

Vous pouvez également consulter le site du ministère des Affaires étrangères, France diplomatie

Situation géographique

Situation de l'Afghanistan

L'Afghanistan, officiellement appelé République islamique d'Afghanistan, est un pays de l'Asie du Sud-Ouest bordé au nord (en Asie centrale) par le Turkménistan, l'Ouzbékistan, et le Tadjikistan, à l'extrême nord-est par la Chine, à l'est et au sud par le Pakistan et à l'ouest par l'Iran. C'est donc un pays situé aux limites du Proche-Orient et de l'Asie, dont la plus grande superficie est couverte par de hauts plateaux ou de hautes montagnes faisant partie de la chaîne de l'Himalaya. Du fait que son territoire de 652 090 km² (équivalant à une superficie un peu plus grande que celle de la France) est enclavé au carrefour des civilisations persane, turque, arabe, indienne, chinoise et russe (entre l'Iran, le Turkménistan, l'Ouzbékistan, le Tadjikistan, le Pakistan et un petite partie de la Chine), cette position stratégique a longtemps entraîné des luttes d'appropriation du territoire.

Carte de l'Afghanistan

La capitale officielle du pays est Kaboul, mais il existe aussi d'autres villes importantes telles que Hérat, Mazar-é-Charif, Kandahar et Djalalabad; pour les talibans au pouvoir, c'est la ville de Kandahar qui est devenue le centre politique du pays. Toutes les villes de l'Afghanistan ont énormément souffert de vingt ans de guerre et tous leurs monuments historiques sont gravement endommagés. Pays principalement montagneux avec peu ou pas de végétation sur plus du deux tiers de son territoire, l'Afghanistan n'a pas accès à la mer.

L'Afghanistan est divisé en trente et une provinces appelées velayat.

Données démolinguistiques

En 1996, l'Afghanistan comptait 21,3 millions d'habitants (estimation de juillet 2001 : 26,8 millions). Cependant, on dénombre aussi un grand nombre de réfugiés. Ainsi, à la fin de la décennie 1980, on dénombrait cinq millions de réfugiés, dont trois millions étaient au Pakistan et un en Iran. Ravagé par vingt ans de guerre en plus d'être affligé par une sécheresse qui se prolonge depuis plusieurs années, l'Afghanistan compterait plus d'un million de déplacés, véritables réfugiés de l'intérieur, qui survivent grâce à l'aide internationale. Pour le moment, cinq millions d'Afghans dépendent de l'aide internationale pour survivre. Actuellement, on peut estimer – toutes les données numériques, quelles qu'elles soient, restent des approximations car il n'y a pas eu de recensement depuis des décennies – que la population du pays compte plus de 24 millions d'habitants (entre 24,5 millions et 29 selon les différentes estimations, auxquels il faut rajouter 3 millions de réfugiés encore présents en Iran et au Pakistan, selon les estimations les plus hautes).

Du point de vue religieux, plus de 99 % de la population afghane est de confession musulmane. La plupart (près de 80 %) des Afghans sont des sunnites de rite hanéfite. Il existe aussi une importante minorité chiite, représentant 20 % de la population, notamment les Hazaras des plateaux du centre et certaines petites ethnies du Nord (dont des Tadjiks). Il existe peut-être encore une infime portion de petites communautés éparses de juifs, d'hindouistes et de parsis.

Les ethnies

La population afghane, essentiellement rurale, peut être divisée en quatre principaux groupes ethniques : les Pashtouns (38 %), les Tadjiks (25 %), les Hazaras (19 %) et les Ouzbeks (6 %). On compte également quelques ethnies moins importantes : les Aïmaks (3,7 %), les Farsiwans (2,8 %), les Turkmènes (1,4 %), les Brahouis (1 %), les Baloutches (0,5 %) et les Nouristanis (0,5 %).

Mais on ne peut totalement ignorer le fait que le pays abrite une trentaine de petites ethnies comptant chacune moins de 10 000 personnes, voire moins de 2 000 ou 1 000 : Arabes, Ashkun, Darwazi, Grangali, Gujari, Jakati, Kamviri, Karakalpak, Kati, Kazak, Kirghiz, Malakhel, Mongols, Munji, Pashayi, Prasuni, Sanglechi, Savi, Shughni, Shumashti, Tangshewi, Tregami, Ouïgour, Waigali, Wakhi, Warduji et Wotapuri-Katarqalai.

Si l'on fait exception des « grandes ethnies », les Pashtouns et les Tadjiks (et peut-être les Ouzbeks et les Turkmènes), la plupart des petites ethnies du pays vivent comme au moyen âge, isolées, enclavées, dans une immense pauvreté, analphabètes (plus de 90 %) et mal soignées, sans savoir ce qui se passe dans le monde.

Voici une petite description des principales ethnies en Afghanistan :

Ethnie Nombre approximatif Langue Région
Pashtouns 7 000 000 pashtou Sud et Sud-Est; Kaboul
Tadjiks 3 500 000 dari Nord et Nord-Est; Kaboul
Hazaras 1 500 000 hazara Centre (Hazarajat) et Kaboul
Ouzbeks 1 300 000 ouzbek Nord
Farsiwan/Herati 600 000 herati Ouest et Sud
Aïmaks 480 000 aimak Ouest
Turkmènes 300 000 turkmène Nord
Brahuis 200 000 brahui Sud-Ouest
Baloutches 100 000 baloutchi Ouest et Nord-Ouest
Nuristanis 100 000 langues nuristanies Est
Les Pashtouns
Les Pashtouns (ou Pashtounes, Pashtous, Pachtos, Pachtounes, etc.), l'ethnie considérée comme majoritaire (38 %), sont des cultivateurs et des éleveurs vivant dans le sud et le sud-est de l'Afghanistan (presque la moitié du pays), ainsi que dans les provinces pakistanaises de Frontière du Nord-Ouest (frontière nord-ouest avec l'Afghanistan) et du Balouchistan. Voir la carte de gauche, zone rose. On en trouve aussi par îlots dans le nord et l'ouest de l'Afghanistan en raison d'une migration favorisée par plusieurs gouvernements d'origine pashtoune (voir la carte ethnolinguistique plus haut).
Dans le centre et le sud du pays, les Pashtouns restent très largement majoritaires. Ils constituent une population fragmentée en une myriade de tribus, clans et patrilignages. Par exemple, les Pashtouns se divisent en plusieurs clans : les Mohmandi, les Ghilzai, les Dorrani, les Yusufzai, les Afridi, les Kandahari (ou Qandahari), les Waziri, les Chinwari (ou Shinwari), les Mangal et les Wenetsi. Mais on doit retenir surtout deux grands groupes de tribus : les Doranni et les Ghilzai.
La famille royale était originaire des Doranni (de la tribu des Mohammadzai. Le coup d'État de 1978 a amené temporairement au pouvoir les Ghilzai. Par la suite, les talibans, qui ont dirigé le pays, étaient des Pashtouns sunnites ultra-orthodoxes, issus de la tribu des Doranni. L'un des grands principes séculaires qui anime les tribus pashtounes est la vengeance (ou vendetta) qu'elles pratiquent entre elles ou contre les autres ethnies du pays. On compte 20 millions de Pashtouns dans le monde, dont 8 millions en Afghanistan et 12 millions au Pakistan (où ils sont appelés Pathans), mais ces derniers ne constituent qu'un petite minorité de 7,7 % dans un pays dont la population est estimée à 155 millions d'habitants. Historiquement, les Pashtouns se sont souvent politiquement et militairement opposés aux Tadjiks, ce qui ne les a pas empêchés de s'installer dans les régions occupées traditionnellement par les Hazaras, au centre du pays. Les Pashtouns parlent tous le pashtou ou l'une de ses variétés dialectales.
Les Tadjiks
Les Tadjiks (25 % de la population) sont des cultivateurs et des commerçants qui comptent parmi les descendants des plus anciens habitants du pays. Ils ne représentent plus aujourd'hui une véritable ethnie, mais plutôt un ensemble de peuples ayant une culture et une langue commune, le dari (ou persan), d'origine iranienne de l'Ouest; autrement dit, le mot Tadjik désigne en Afghanistan tous les persanophones sunnites du pays. Les Tadjiks parlent le dari (appelé farsi en Iran).Les Tadjiks sont plus dispersées que les Pashtouns et habitent surtout dans le Nord-Est jusqu'à Kaboul, puis ils sont répartis en plusieurs îlots vers l'ouest. On trouve des Tadjiks en Afghanistan, mais aussi au Tadjikistan, en Ouzbékistan, au Kazakhstan, en Iran et en Chine, pour un total de quelque 11 millions de personnes, dont sept en Afghanistan. Les Tadjiks d'Afghanistan, comme ceux des autres pays limitrophes, demeurent coupés géographiquement de leurs sources linguistiques iraniennes (voir la carte de gauche, en jaune). On distingue deux catégories de Tadjiks: les «Tadjiks montagnards» par opposition aux « Tadjiks des plaines » ; les premiers sont des musulmans chiites, alors que les seconds, appelés Farsiwans, sont de rite sunnite. En Afghanistan, les Tadjiks comptent traditionnellement parmi les adversaires les plus déterminés des Pashtouns.
Les Hazaras
Comme beaucoup de groupes persanophones — c'est-à-dire parlant une langue originaire de l'Iran —, les Hazaras (19 % de la population), un peuple d'agriculteurs et d'éleveurs, se considèrent parfois comme des Tadjiks. Ce sont, comme les Aïmaks, des descendants des Mongols issus de la Conquête à la fin du xive siècle et restés isolés en Afghanistan avec la fin de l'Empire mongol. C'est ce qui expliquerait pourquoi les Hazaras présentent des traits nettement mongoloïdes. Les tribus hazaras les plus importantes sont les Dai Kundi (population : 52 000), les Dai Zangi (60 000), les Besud (100 000), les Polada (45 000), les Jaghuri (117 500) et les Uruzgani (65 000). Mais leur principale caractéristique identitaire est d'être des musulmans chiites dans un pays majoritairement sunnite. Souvenons-nous que le chiisme est né au viie siècle siècle de notre ère, après la mort du prophète Mahomet, d'une contestation qui portait sur la désignation du guide des musulmans : les chiites affirmaient que ce rôle revenait à Ali, le gendre de Mahomet, ainsi qu'à sa descendance, alors que les sunnites pensaient que le chef de la communauté musulmane devait être désigné parmi les fidèles. Pourchassés par les Pashtouns sunnites, les Hazaras chiites ont fini par se cantonner dans les plateaux et les vallées des provinces centrales (cf. Ghowi, Oruzgan, Bamian) qui constituent leur patrie et qu'on appelle le Hazaradjat. Cette région a toujours bénéficié d'une grande autonomie administrative, surtout depuis 1979, et officiellement depuis 1984. Le régime de terreur qu'ils connaissent maintenant leur a fait perdre cette autonomie. Beaucoup de Hazaras ont émigré vers les grandes villes, notamment à Kaboul, mais beaucoup d'autres ont fui vers les pays voisins à la suite des guerres (depuis 1978) dont ils ont été victimes de la part des Pashtouns. Ils parlent le hazara, une autre langue indo-iranienne, mais aussi le tadjik (farsi en Iran) comme langue seconde.
Les Ouzbeks
Cette minorité turcophone (parlant l'ouzbek) de 1,4 million de locuteurs habite au nord de l'Afghanistan, près de la frontière avec le Turkménistan, l'Ouzbékistan et le Tadjikistan. On trouve des Ouzbeks surtout en Ouzbékistan (16,5 millions), mais également au Kirghizistan, au Tadjikistan, en Chine et en Turquie. Les Ouzbeks furent des envahisseurs turco-mongols au xvie siècle et restèrent maîtres du Turkestan jusqu'au xixe siècle. En Afghanistan, les Ouzbeks sont généralement des cultivateurs et des artisans habitant des villages le long des canaux d'irrigation dans la plaine septentrionale. Ce sont, en principe, des musulmans sunnites de rite hanéfite, mais beaucoup sont des non-pratiquants. En Afghanistan, les Ouzbeks sont considérés par les sunnites ultra-orthodoxes comme des « infidèles ».
Les Turkmènes
D'une origine ethnique similaire aux Ouzbeks (turcophones), les Turkmènes forment un peuple d'éleveurs (moutons, chèvres, chevaux) estimé à environ 500 000 personnes. Ils parlent le turkmène et sont arrivés de Russie pendant la première moitié du xxe siècle. Ils habitent aujourd'hui tout au nord de l'Afghanistan, mais la plupart des six millions de Turkmènes résident au Turkménistan, au nord-est de l'Iran, en Turquie, en Russie et en Chine. Ce sont des musulmans sunnites divisés en de nombreuses entités claniques.
Les Aïmaks
Les Aimaks forment une vingtaine de tribus vivant dans les montagnes de la province de Ghowr, au centre-ouest de l'Afghanistan. Ils sont 480 000 dans le pays, mais d'autres groupes habitent au nord-est de l'Iran et au Tadjikistan. Ce sont des musulmans sunnites semi-nomades parlant l'une des nombreuses variétés dialectales de l'aïmak (de filiation iranienne) : taimuri, taimani, zuhri, jamshidi, firozkohi, maliki, mizmast, chinghizi et zainal.
Les Nouristanis
Le nom de Nouristani (ou Nurestâni) sert à désigner un ensemble de petites communautés indo-iraniennes (spécifiquement de filiation indienne) islamisées depuis une centaine d'années et vivant dans les hautes vallées afghanes du versant sud de l'Hindou Kouch oriental, dans les provinces de Konarha et de Laghman, à l'est de Kaboul (voir la carte des provinces). Les Nuristanis ne sont pas organisés en tribus, et ils se définissent par leur village de résidence et leur langue propre. Leur territoire, appelée anciennement le Kâfiristan (de Kâfir : « païens », c'est-à-dire « non musulmans »), est désigné aujourd'hui comme le Nuristan (la « terre de lumièr e»). Les Nuristani forment peut-être une population totale de 100 000 personnes (en Afghanistan, en Inde et au Pakistan). Les Nuristanis afghans sont de religion musulmane sunnite, mais beaucoup d'entre eux continuent de pratiquer leurs cultes ancestraux d'avant la conquête pashtoune (1895). On compte six langues nuristanies: l'ashkun (7 000 locuteurs, en neuf villages), le kamviri (4 000), le kati (15 000), le prasuni (2 000), le tregami (1 000 locuteurs, en trois villages) et le waïgali (10 000 locuteurs, en neuf villages). Les Nuristanis d'Afghanistan, à l'instar des Brahuis, des Baloutches, des Hazaras, etc., font partie des minorités tenues en piètre estime.
Les Brahouis
Ce peuple d'origine dravidienne compte une population de 100 000 individus en Afghanistan, 500 000 au Pakistan et 50 000 en Iran. Les Brahuis d'Afghanistan habitent dans le Sud-Ouest, soit dans les provinces de Quandahar, Hellmand et Nimruz (voir la carte des provinces et celle des groupes ethnolinguistiques), près de la frontière pakistanaise. Alors qu'au Pakistan les Brahuis sont très influencés par le sindhi et le baloutchi, ceux de l'Afghnistan empruntent massivement au pastou. C'est ce qui expliquerait pourquoi la langue brahuie semble en régression parmi cette population d'origine dravidienne : on estime qu'elle n'est plus parlée que par 70 % des Brahuis.
Les Baloutches
La plupart des Baloutches (5,6 millions au total) vivent dans le Baloutchistan au nord du Pakistan, mais il existe des communautés baloutches importantes en Afghanistan (environ 100 000), en Iran (environ un million) et au Turkménistan (environ 28 000). Les quelque 10 000 Baloutches de l'Afghanistan habitent dans le Sud-Ouest, soit dans les provinces de Quandahar, Hellmand et Nimruz (voir la carte des provinces et celle des groupes ethnolinguistiques), près de la frontière pakistanaise. Les Baloutches du pays se réclament du sunnisme hanafite, bien qu'ils conservent de nombreuses croyances particulières et de cultes locaux. Ils parlent le baloutchi, une langue iranienne de la famille indo-européenne.

Du point de vue religieux, on doit préciser que tous les Afghans qui ne sont pas des sunnites orthodoxes peuvent être considérés aujourd'hui comme des minorités religieuses.

Cela signifie que seuls les Pashtouns ultra-orthodoxes ( les talibans) n'entrent pas dans cette catégorie. Tous les autres groupes, notamment les Tadjiks modérés (sunnites), les Hazaras (chiites), les ethnies turcophones sunnites (Ouzbeks, Turkmènes, Ouïgours, etc.) sont de véritables minorités religieuses pourchassés par les talibans pour leurs convictions non conformes.

Les langues du pays

Deux langues officielles : le pashtou et le dari

On compte autant, sinon davantage, de langues que d'ethnies en Afghanistan. La plupart des langues de ce pays (pashtou, dari, hazara, aïmak, nuristani, baloutchi, etc.) appartiennent au groupe indo-iranien (famille indo-européenne) et sont répartis sur les deux tiers de la superficie du pays, mais surtout au sud (voir la carte ethnolinguistique). Quelques autres langues, telles que le turkmène (tout au nord), le kirghiz (tout au sud-ouest), le kazakh, l'ouïgour et le karakalpak, font partie de la famille altaïque et sont concentrés davantage au nord (voir la carte ethnolinguistique). Il ne reste que deux langues dans tout le pays n'appartenant à aucune de ces deux familles : le brahui (200 000 locuteurs dans le Sud-Ouest) de la famille dravidienne et l'arabe (5 000 locuteurs disséminés dans quelques villages de la province de Takhar, au nord-est) de la famille chamito-sémique. Le pashtou et le dari sont, en principe, les deux langues officielles de l'Afghanistan. En Afghanistan, tous les groupes ethniques constituent des minorités linguistiques du point de vue strictement numérique. Dans les faits, ceux qui parlent le pashtou ou le dari font partie des groupes traditionnellement dominants, mais depuis le régime des talibans le pashtou a gravi des échelons dans la hiérarchie des langues. Quelques précisions s'imposent sur les deux langues officielles du pays :

La langue pashtoue (1e langue officielle de l'Afghanistan)
Les Pashtouns (38 % de la population) parlent le pashtou (ou afghan), une langue indo-iranienne. On distingue deux grandes variété de pashtou : le pashtou du Nord (ou pakhtou) et le pashtou du Sud (proprement pashtou). Le pashtou du Nord est appelé pakhtu en référence aux phonèmes [kh] et [gh] de cette variété linguistique parlée dans le nord du pays et au Tadjikistan en Asie centrale. Cette variété du Nord ne représenterait que quelque 13 % des locuteurs du pashtou et est fragmentée en pakhtou du Nord-Ouest, ghilzai et durani. Suivant les régions pakhtounes, on observe de sensibles différences de prononciation. Les locuteurs du pakhtou du Nord sont appelée des Pakhtouns (plutôt que des Pashtous). Quant au pashtou du Sud, il est parlé par les autres Pashtouns afghans (env. 87 %), soit dans les provinces du Sud (Helmand, Quandahar, Zabol, Ghazni, Paktia, etc.), mais aussi au Pakistan et en Iran. Ces variétés dialectales, appelées pashtou (en référence aux phonèmes [sh] et [zh]) sont les suivantes: le pahstou du Sud-Ouest et le pashtou de Kandahar. Ici aussi, selon les régions, on observe des différences dans la prononciation. Tous les Pashtouns se comprennent entre le Nord et le Sud, car les mots sont communs dans une proportion de 80 %, même si des différences notables de prononciation subsistent.
Le pachtou ou pouchtou, qui est la langue la plus parlée en Afghanistan, appartient au groupe iranien de la famille des langues indo-européennes. Elle n'offre, ni dans ses racines, ni dans sa grammaire, aucune ressemblance avec l'hébreu, le chaldéen, l'arabe ou une autre langue sémitique. Seulement, les Afghans ont emprunté à l'arabe, par le canal du persan, les mots relatifs à la religion, à l'administration et aux sciences, et ils se servent aussi de l'alphabet persan, auquel ils mêlent des points ou autres signes pour exprimer quelques sons que les lettres persanes ne représentent pas. La déclinaison dans le pachtou est conforme à l'hindoustani, et la conjugaison au persan (farsi). On distingue dans le pachtou plusieurs dialectes : le dourani, le berdourani, et le patani. Les langues pashtoues s'écrivent avec les caractères de l'écriture arabe, mais de nombreux signes supplémentaires ont dû être ajoutés pour tenir compte des phonèmes particuliers au pashtou (par exemple, la voyelle [e] neutre qui n'existe ni en persan ni en arabe).
La langue dari ou persan (2e langue officielle de l'Afghanistan)
On estime que 26 % des Afghans parlent le dari (ou farsi) comme langue maternelle, mais il est probable que deux fois plus de personnes seraient capables, d'une façon ou d'une autre, de s'exprimer dans cette langue. Le dari est une langue indo-iranienne parlée avant tout par les Tadjiks, mais la plupart des Afghans persanophones emploient également cette langue dans leurs communications avec les autres ethnies et, jusqu'à récemment, avec l'Administration centrale. On distingue trois variétés de farsi : celui parlé en Iran (appelé farsi ou persan), celui parlé en Afghanistan (appelé dari) et celui parlé au Tadjikistan en Asie centrale (appelé tadjik). Le dari et le farsi sont des langues très proches l'une de l'autre, mais le dari est plus archaïsant (ou plus conservateur) et il maintient des distinctions de voyelle qui ont été perdues en farsi d'Iran. Comme élément de comparaison, on pourrait dire que le farsi de l'Afghanistan et celui de l'Iran sont aussi différents que le sont le français parlé à Paris et celui parlé à Montréal (au Québec). En fait, les différences sont d'ordre phonétique, lexical, stylistique et culturel. N'oublions pas que les Iraniens pratiquent l'islam chiite, alors que les Afghans sont très majoritairement sunnites. Le farsi d'Iran est considéré comme le « persan standard » et le terme farsi provient du nom de la province du Fârs en Iran. Dans ce pays, le farsi est aussi appelé persan, car Fârs et Pars (signifiant « Perse ») proviennent du même mot, le [f] de Fârs et le [p] de Pars étant phonétiquement très proches. Mais, comme le [p] existe en farsi mais pas en arabe, il paraît probable que la prononciation Fars soit une altération arabe de Pars; c'est le la prononciation du [f] qui aurait fini par s'imposer aux Iraniens. Les Afghans, pour leur part, tiennent à employer le mot dari pour désigner leur langue, c'est-à-dire le « persan de la cour », qui représente sa forme littéraire traditionnelle et plus archaïsante. Quant aux Tadjiks du Tadjikistan, ils utilisent surtout le terme tadjiki et parfois farsi de l'Ouest pour désigner leurs deux variétés de tadjik (en alphabet cyrillique). Le farsi d'Iran, le dari d'Afgahnistan et le tadjik du Tadjikistan sont considérés comme trois langues différentes, bien que, sur le plan strictement linguistique, le farsi et le dari constituent des variantes régionales très proches. Néanmoins, les trois idiomes sont mutuellement intelligibles, mais les différences avec le tadjik du Tadjikistan sont plus importantes, d'une part, parce qu'il s'écrit avec l'alphabet cyrillique, d'autre part, parce qu'il emprunte massivement aux langues turques. Comme pour le pashtou, le dari d'Afghanistan n'est pas parlé de façon uniforme. Il subsiste plusieurs variantes dialectales d'une région à l'autre; même les Tadjiks de la capitale, Kaboul, parlent une forme particulière de dari, désignée sous le nom de kabôli.
Le dari utilise un alphabet arabo-persan, mais légèrement différent du pashtou.
L' alphabet Dari se compose de 32 lettres qui sont écrites dans l'ordre (de droite à gauche) :
ا ب پ ت ث ج چ ح
خ د ذ ر ز ژ س ش
ص ض ط ظ ع غ ف ق
ک گ ل م ن و هـ ی
Le persan est aussi appelé dari en Afghanistan et tadjik (ou tajiki) au Tadjikistan. Il existe maintenant un « persan tehrâni » (Téhéran > Tehrani en persan), qui tend à devenir la norme standard en Iran et même ailleurs du fait des médias électroniques et des publications venant d'Iran. Cela étant dit, les Iraniens, les Afghans et les Tadjiks parlent persan et, si l'on veut exprimer l'origine géographique, on parle de farsi, de dari ou de tadjik, mais on emploie aussi les dénominations doubles: persan farsi, persan dari et persan tadjik. Dans un contexte particulier, le mot « persan », employé seul, suffit pour désigner le persan d'Iran (farsi). Un Afghan parlant le persan dari comprend parfaitement un Iranien de Téhéran parlant le persan tehrâni ou un Tadjik parlant le persan tadjik. En somme, lorsqu'on utilise le terme persan, c'est en ne faisant aucune allusion géographique à la langue. On dira par exemple: « Apprendre le persan. » Les Iraniens eux-mêmes disent parler le farsi, signifiant inconsciemment que leur persan local est différent de celui de l'Afghanistan ou du Tadjikistan. Par ailleurs, beaucoup d'Occidentaux vont appeler la langue des Iraniens simplement l'iranien, comme on l'a fait avec d'autres cas similaires : Italie (italien), Allemagne (allemand), Espagne (espagnol), Serbie (serbe), Croatie (croate), Indonésie (indonésien), Japon (japonais), etc.

La politique linguistique

Il est malaisé de décrire la politique linguistique de l'Afghanistan, car elle n'était pas écrite. Sous les talibans, l'Afghanistan n'était pas un État de droit, mais une théocratie où régnait l'arbitraire. Cependant, les pratiques alors en usage dans le pays donnent une assez bonne idée de la politique linguistique. Or, c'étaient les Pashtouns ultra-orthodoxes qui gouvernaient le pays et ils avaient la nette tendance à favoriser l'ethnie pashtoune ainsi que la langue pashtoue, aux dépens de toutes les autres langues. On peut même penser que les talibans voulaient faire disparaître toute trace de l'autre langue officielle du pays, le dari, qui est non seulement l'une des deux langues véhiculaires du pays, mais aussi une grande langue de culture depuis des millénaires.

Les écoles

Après plus de vingt ans de guerre et de querelles internes en Afghanistan, le secteur de l'éducation avait été durement malmené. Des régions entières ont plusieurs fois changé de mains entre les différentes factions en guerre. L'UNESCO déclarait à ce sujet que le système éducatif a été paralysé, mais que le recueil des données est pratiquement impossible en l'absence d'un gouvernement national universellement reconnu et acceptable. Bien que l'enseignement primaire ait déjà été décrété gratuit et obligatoire, le taux d'analphabétisme atteignait déjà 68,5 % en 1994, mais il est beaucoup plus élevé en 2000, surtout depuis que les filles ont été exclues des écoles, même dans les écoles coraniques. Certaines estimations avancent même qu'il serait plus élevé que 85 % et atteindrait les 88 %. D'ailleurs, en 1994, soit avant l'arrivée au pouvoir des talibans et sans doute à cause de la guerre civile, le pourcentage des jeunes scolarisés de 12 à 17 ans retombait à 15,5 %, c'est-à-dire moins que dans les années soixante-dix. Dans l'état actuel des choses, il est difficile de décrire la situation anarchique qui prévaut désormais dans le domaine de l'éducation. Seulement 6,8 % des enfants accéderaient aux études primaires (0,3 % termineraient), 1,2 % au secondaire et 1,5 % à l'université. Durant les quatre premières années qui ont suivi la prise du pouvoir par les talibans, la majorité des écoles ont dû fermer leurs portes. Les écoles enseignaient dans la langue de la province de résidence : le pashtou, le tadjik, l'ouzbek, etc. Ensuite, les écoles pour garçons ont finalement rouvert, au grand soulagement d'une partie de la population, mais seul le pashtou servit de langue d'enseignement. Dans le sud du pays, les talibans ont autorisé les écoles de garçons, mais l'enseignement primaire fut dominé par une idéologie religieuse fondamentaliste. Après tant d'années sans école, la question qui se posait le plus cruellement pour les familles était celle-ci : fallait-il envoyer leurs fils dans ces écoles au risque de les voir tourner en véritables petits talibans ou les priver encore d'instruction ? Pour les filles, interdites temporairement des écoles, la question ne se posait même plus. Après l'arrivée des talibans, neuf femmes sur dix sont devenues analphabètes. Le gouvernement taliban a toujours fait état de la situation militaire et du manque de fonds qui en résultait au nombre des raisons pour lesquelles les femmes n'avaient plus accès à l'éducation. En effet, toutes les filles furent exclues des écoles. Le vice-ministre Saïd Nazer Mohammed Agha commentait à ce sujet : L''éducation des filles n'est pas notre priorité. Selon ce vice-ministre : Les écoles pour filles vont rouvrir. L'interdiction était temporaire. Nous devons prendre le temps d'assurer leur sécurité et d'organiser des écoles séparées. Quant à la mise en place d'écoles séparées, soit les filles d'un côté, les garçons de l'autre, le vice-ministre a toujours refusé de reconnaître l'inaction de son gouvernement à ce sujet. C'est pourquoi, dans le plus grand secret, des centaines de familles afghanes ont continué pourtant d'éduquer leurs filles. Un système parallèle, évidemment tout à fait illégal, a été mis en place : des parents payaient des professeurs pour donner des cours privés à leurs fillettes. On estime qu'environ 18 % des enfants inscrits dans les écoles étaient des filles.

Dans presque toutes les écoles sous contrôle talibans, des mollahs se sont improvisés instituteurs. Les services éducatifs continuaient d'être assurés par les administrations locales de manière tout à fait sporadique. Les mollahs ont été dépêchés dans les écoles afghanes par le ministère de l'Éducation fixé à Kandahar, la capitale religieuse. Leur rôle officiel consistait à remplacer les institutrices désormais cloîtrées à la maison et, surtout, veiller à la stricte application de la Charia, la loi islamique, dans les établissements d'enseignement. Tous les élèves devaient porter le turban et le chalwar camiz, l'habit traditionnel afghan (une sorte de pyjama très ample). Les garçons les plus âgés devaient aussi laisser pousser leur barbe. Le seul mot d'ordre : se rapprocher le plus possible, en apparence comme dans la ferveur religieuse, du prophète Mahomet, celui qui a reçu, au viie siècle, la parole de Dieu, et qui fut à l'origine de la religion islamique. Les livres de classe reflétaient aussi de cette logique : plutôt que de recycler les manuels scolaires importés par les soviétiques au temps de l'occupation, les talibans ont acheté des manuels imprimés ces dernières années au Pakistan par les factions moudjahidines. Ces manuels bénéficiaient d'un avantage incomparable : ils faisaient l'apologie de l'islam et ils étaient tous rédigés en langue pashtoue. Tout l'enseignement en Afghanistan tournait autour de la religion, mais les garçons apprenaient au moins à lire et à écrire. Le nombre des disciplines était singulièrement réduit : il fallait compter trois ans pour apprendre par cœur le Coran, puis on se lançait dans l'apprentissage de la vie et des paroles du prophète Mahomet. La jurisprudence islamique et l'histoire islamique étaient au programme des plus âgés. La littérature, les sciences, les mathématiques, les langues étrangères, la géographie, l'histoire, etc., n'avaient pas droit de cité. C'était un principe généralisé dans les écoles coraniques d'Afghanistan. Pendant les bombardements américains, les talibans vidaient des écoles secondaires et recrutaient des adolescents. Pour ce qui est des établissements d'enseignement supérieur, on estime que seuls 1,5 % des jeunes fréquentaient ces établissements. La principale université est celle de Kaboul, fondée en 1932. L'école de commerce (1943), l'Institut polytechnique (1951) et l'Université islamique (1988) sont tous dans la capitale. Seule l'université de Nangarhar (1962), plus petite, est située à Djalalabad. Les universités ont toutes été interdites aux femmes afghanes. Avant 1996, on comptait 60 % de femmes à l'université de Kaboul. Non seulement les femmes en furent exclues, mais les hommes devaient consacrer une large part de leur horaire à des cours de religion quotidiens. Beaucoup de professeurs ont été tués, alors que les autres ont choisi l'exil pour se soustraire à l'étranglement intellectuel. Quelques années plus tard, la plupart des bâtiments publics de Kaboul, dont les écoles, les universités et les hôpitaux, avaient été détruits.

La situation change. Plus de quatre millions d'enfants sont retournés dans les établissements d'enseignement.

Sources
  1. LECLERC, Jacques. « Afghanistan » dans L'aménagement linguistique dans le monde, Québec, TLFQ, Université Laval, 18 janvier 2008, [http://www.tlfq.ulaval.ca/axl/asie/afghanistan.htm], (14 novembre 2008), 309 Ko.
  2. WIKIPÉDIA, coll. Article « Afghanistan », 10 novembre 2008, [http://fr.wikipedia.org/wiki/Afghanistan], (14 novembre 2008), 780 Ko (document sous licence de documentation libre GNU, GFDL).

Direction des services départementaux de l'éducation nationale de l'Yonne
Dernière mise à jour de cette page le 14/11/2008.